Un coup d'œil sur un village de Barkon IV permet de déceler un usage avancé des techniques de maçonnerie. Les constructions, les arches qui se dressent aux entrées de la place centrale et les routes elles-mêmes sont faites de gros blocs de pierre grise.
La place du village est d'une étonnante propreté, on n'y trouve aucun détritus, pas même les excréments des bêtes de charge. La bicyclette constitue le moyen de transport privilégié. L'état sanitaire du village témoigne à la fois de la sensibilité esthétique des Barkoniens et de leur compréhension du rôle majeur de l'hygiène.
La vie sociale s'articule autour de la place, c'est là que l'on trouve le puits communal. L'atelier du forgeron, la boulangerie et d'autres boutiques entourent la place, où se dresse aussi l'école en plein air (le climat y est fort clément).
Les Barkoniens possèdent un sens esthétique affirmé, quoique tout à fait dépourvu d'ostentation. Leurs vêtements, qui rappellent ceux de l'Europe médiévale, sont taillés dans de riches étoffes aux chauds coloris. Le tissage est un art majeur sur Barkon IV. D'épaisses couvertures tissées sont employées dans la literie. Des tapis et tapisseries colorés ornent les sols et les murs de pierre grise des intérieurs Barkoniens. Leurs étonnants motifs, souvent géométriques ou abstraits, prennent parfois la forme de représentations stylisées d'épisodes tirés des mythes et légendes de Barkon.
Ces tapis et tapisseries se conjuguent aux lampes et aux grandes fenêtres parfois garnies de vitraux pour créer une ambiance chaleureuse, très agréable. Les dimensions des pièces, le mobilier de bois et de tissu, ainsi que les plantes contribuent à cet effet plaisant. Métaux ouvragés et sculptures, qui relèvent aussi des arts majeurs, ornent l'intérieur comme l'extérieur des bâtiments.
Bien que la société Barkonienne soit de type patriarcal, la gent féminine n'est nullement exclue de la vie publique. Les femmes de savoir sont très recherchées pour leurs compétences, notamment dans les domaines de la médecine et de l'éducation. Les filles fréquentent l'école avec les garçons. Tous les élèves apprennent la lecture et l'écriture, l'arithmétique et les sciences.
La médecine et les sciences Barkoniennes ne peuvent être considérées au sens où nous les entendons, mais on s'aperçoit que la culture des Barkoniens n'est peut-être qu'à quelques générations de sa révolution scientifique.
Les savants recherchent des réponses à des questions concernant l'essence et la nature du monde. Ils s'écartent des superstitions des générations précédentes, dont la croyance dans les démons, les esprits et les monstres est tournée en ridicule. Ils n'ont toutefois pas encore découvert de méthodes expérimentales proprement scientifiques.
Les Barkoniens modernes ont tendance à raisonner par analogies, ils font plutôt des observations superficielles au lieu de rechercher quelques éléments de preuve empiriques. Ainsi, ils croient que les principes fondamentaux de l'Univers sont la roche, le feu, l'air et l'eau.
Pour apporter aux étudiants la preuve de cette assertion, un enseignant pourra examiner avec sa classe un simple bâton. Son poids met en évidence la roche, sa combustibilité met en évidence le feu, la fumée du feu met en évidence l'air. Il est plus difficile de mettre l'eau en évidence dans un morceau de bois, mais l'explication donnée est que parfois un élément est enfoui très profondément dans un objet.
En dépit de leur manque de méthodologie, les Barkoniens manifestent un vif désir de comprendre le monde qui les entoure, ils ont commencé à mettre au point des instruments scientifiques, la loupe notamment.
Leur médecine est encore assez primitive, mais ils possèdent une certaine connaissance de l'anatomie interne et externe, ainsi que quelque compréhension du rôle de la température corporelle.
Les érudits tiennent en dérision les superstitions des générations qui les ont précédés.
Contrairement à ce qui s'est passé dans l'Europe médiévale de la Terre, la révolution de la pensée scientifique ne sera pas entravée par la religion, mais la lutte contre la superstition risque de s'avérer tout aussi délicate. Le peuple, certes pacifique, tend à se réfugier derrière les remparts de cette superstition dès lors qu'il se sent menacé par les assauts de la raison. Pour une société simple et stable, le changement est souvent perçu comme la plus grande de toutes les menaces.
Les Barkoniens doivent aussi, dans leur cheminement vers l'édification scientifique, intégrer le principe cartésien selon lequel la croyance doit être réservée à ce qui est certain et prouvé (ou prouvable).
Les villageois de Barkon, par exemple, croient que les montagnes sont habitées et que leurs habitants sont assez robustes pour supporter les rigueurs de l'hiver et combattre les bêtes féroces qui peuplent ces contrées.
Aucun villageois n'est jamais allé jusqu'à ces montagnes, ni n'a vu de montagnard ou de bête féroce, leur existence est simplement un fait bien connu.
Les Barkoniens semblent pourtant prêts à se défaire de leur naïveté. Leur société paisible et relativement prospère encourage l'éducation de tous ses citoyens et a déjà jeté les bases des progrès de la science et du savoir. Sa quête d'explications scientifiques, de préférence à celles que fournit la superstition, l'a faite progresser vers une meilleure compréhension de l'Univers.
Banque de données