Turkana IV est un monde de classe M, l'une des rares colonisations terriennes à s'être soldées par un échec cuisant. Le gouvernement colonial commença à s'effondrer en 2367 et la société se délita rapidement. La capitale en passa par une cassure nette de l'ordre social. Des dizaines de factions se disputèrent le pouvoir jusqu'à ce que la cité soit un champ de ruines fumantes. Les survivants furent contraints de chercher refuge sous terre.
Le gouvernement étant incapable d'enrayer ces flambées de violence, la loi du plus fort s'instaura, des gangs de violeurs se partagèrent les quartiers urbains et les combats de rues n'eurent plus de cesse. Pour finir, les deux factions les plus puissantes restèrent seules en lice : la Coalition et l'Alliance.
En désespoir de cause, le gouvernement, réduit aux abois, accorda des pouvoirs légaux et policiers aux deux bandes rivales et tenta de les garder sous contrôle en les infiltrant d'agents des deux camps dotés de détecteurs de proximité.
Malgré cette ultime tentative pour préserver un semblant d'ordre, le gouvernement de Turkana tomba quelques mois plus tard. Depuis lors, la Fédération Unie des Planètes est dans l'incapacité de maintenir des communications fiables et durables avec cette colonie.
En 2352, le contact a été entièrement coupé. Suite à cela, Turkana IV a observé une politique d'isolement complet.
En 2361, on prévint même l'USS Potemkin NCC-18253 que quiconque se téléporterait à la surface de la planète serait abattu à vue.
Les constructions à ciel ouvert étant pratiquement toutes détruites, les colons ont trouvé refuge dans des structures souterraines qui courent à près de huit kilomètres sous terre.
Cette nouvelle ville sous la ville à la forme d'une pyramide inversée, la pointe s'enfonçant dans les entrailles de la terre. Divers points d'entrée permettent d'accéder à ce vaste réseau de tunnels. Les culs-de-sac abondent et l'absence de carte ne facilite pas l'orientation dans ce labyrinthe complexe à souhait.
L'Alliance et la Coalition se sont partagées la ville martyre. Les détecteurs de proximité empêchent l'une et l'autre faction de frapper un grand coup et de prendre l'avantage sur sa rivale. Leurs affrontements se réduisent à des escarmouches d'ordre mineur, visant à piller les approvisionnements de l'autre, dont beaucoup sont d'une importance ou d'une utilité toute relative. De tels raids influent très peu sur l'équilibre des pouvoirs. Ils servent surtout d'exercices de combat, offrant parfois l'occasion de glaner des informations sur les défenses ou le potentiel offensif adverses.
L'armement dont disposent les deux factions est limité. L'arme la plus commune est le bâton paralysant. Les phasers et autres armes d'un genre plus redoutable sont assez rares. Tant que l'une ou l'autre faction n'aura pas rassemblé davantage d'armes puissantes, les détecteurs de proximité continueront à définir l'orientation du conflit.
Objet magnétique octogonal d'environ trois centimètres de long sur deux de large, chaque détecteur est implanté sous la peau de l'individu, tout près de la clavicule. Quand un agent se trouve en territoire ennemi, le détecteur s'illumine.
Il clignote lorsqu'un ennemi approche et déclenche aussi des alarmes réparties à des endroits stratégiques dans le territoire souterrain de chaque faction. Le détecteur de proximité reste invisible quand l'agent qui le porte se cantonne à son territoire et qu'aucun adversaire n'approche.
Les détecteurs de proximité implantés aux ressortissants de la Coalition diffusent une lumière jaune, ceux de l'Alliance une lumière verte.
Chaque exemplaire est équipé d'un micro explosif que le moindre contact avec l'air fait détoner. Sans accès à une technologie médicale avancée, son ablation est donc très risquée. Autant dire qu'avec les ressources limitées dont on dispose sur Turkana IV, s'en débarrasser sans le payer de sa vie est quasiment impossible.
Les détecteurs de proximité symbolisent donc de façon frappante l'assujettissement des individus au gang. Sur Turkana IV, ils incarnent autant l'identité des gens qu'un moyen radical de juguler la violence. Les natifs se dévouent corps et âme à leur faction. Pour beaucoup d'entre eux, elle représente leur famille, leur offrant la seule sécurité qu’ils ne connaîtront jamais. Nombre des membres des deux gangs ont préféré rester sur leur planète et continuer à combattre, alors même que la fuite semblait la moins mauvaise des solutions.
Malgré la paix relative imposée par les détecteurs de proximité et l'incapacité des colons à porter la guerre dans le camp ennemi, la nature passionnelle (sinon obsessionnelle) de cette communauté s'associe le plus souvent à des luttes d'une rare violence. Les factions en présence sont l'une et l'autre farouchement déterminées à l'emporter.
À la fin des années 2360, il semble que l'Alliance soit en passe de prendre la main. Elle dispose de deux quartiers généraux principaux et de treize bases d'opérations secondaires, toutes situées profondément sous terre et sévèrement gardées. Leur système de défense est alimenté par deux sources principales de fusion, près des quartiers généraux.
En 2367, la Fédération refait une brève apparition dans l'histoire de Turkana IV quand une nacelle d'évacuation abritant deux survivants de l'USS Arcos, un cargo de la Fédération victime d'une rupture de son tore de distorsion, se pose sur la planète. L'Alliance les prend aussitôt en otages, les retenant prisonniers dans une chambre située près de ses quartiers généraux. Cette faction exige ensuite réparation pour ce qu'elle qualifie « d'intrusion de la Fédération ». Faute de quoi, les prisonniers seront torturés et exécutés.
L'USS Enterprise NCC-1701-D répond au signal de détresse lancé par l'Arcos, et les deux gangs tenteront de forcer le vaisseau de la Fédération à infliger de sérieux dégâts au camp adverse. Alors que l'Enterprise réussit à libérer les rescapés de l'Arcos, l'Alliance et la Coalition, en revanche, échouent l'une et l'autre à retourner la situation à leur avantage. Les deux factions en restent à un statu quo amer et Turkana IV demeure la preuve vivante que toute société a fondamentalement besoin d'une structure organisée pour survivre et prospérer.